Le 2 novembre 2020
LE BÉGUINAGE DE MURS-ERIGNE AU RENDEZ VOUS DE L'HISTOIRE !
Caché derrière de hauts murs, les 2,5 ha de l’ancien séminaire de la rue Saint-Vincent, devenu aujourd’hui pour partie le béguinage Saint Vincent, comporte encore leur part de mystère.
Le béguinage Saint Vincent à Mûrs-Erigné
En 1938, une banque y abritait des titres dans un blockhaus souterrain. Interdits durant l’occupation allemande, les lieux étaient encore discrets lorsque les religieux en ont fait un séminaire.
Certes aujourd’hui le béguinage Saint Vincent et des constructions nouvelles ont fait disparaître l’ancienne banque du Crédit industriel et commercial mais l’ancien coffre-fort et bunker est resté.
Les ouvriers tendent l’oreille. « Pardon, vous dîtes qu’il y avait de l’or ? Vous croyez qu’il en reste encore. » La « banque » alimente toujours les fantasmes à Mûrs-Erigné. 75 ans après la Libération.
L’ancienne banque, construite entre 1937 et 1939 par le Crédit industriel et commercial de Paris, n’est plus. Le bâtiment a laissé place à un parc, aujourd’hui entouré du béguinage et de maisons en construction.
À quelques mètres de là trône le château de la Dubinière. Certains croient encore y déceler quelques impacts des balles, témoins des combats de la Libération, avant qu’il ne devienne aujourd’hui les espaces de convivialité du béguinage Saint Vincent.
L’ancien château de la Dubinière, Batiment classé remarquable devenu le béguinage Saint Vincent
Le site a en effet été réquisitionné par les Allemands dès 1942. Le centre de commandement de la Kriegsmarine est installé à Pignerolle à Saint-Barthélemy-d’Anjou et les nazis y adjoignent un relais à Mûrs-Erigné. L’ancienne banque, qui a été vidée de son or avant l’occupation, est transformée en camp de base.
Sous la banque, le coffre-fort du Crédit industriel et commercial devient le siège de la Kriegsmarine, rien que ça. Madeleine Chanteux en parle dans son livre « Libération des Ponts-de-Cé et de Mûrs-Erigné ». L’auteure explique au fil des pages qu’un blockhaus y est construit dans le coffre-fort déjà existant de six niveaux dont trois sous-sols fortement blindés.
« Les Allemands avaient installé deux mitraillettes avec quatre canons chacune. Quand ils tiraient la nuit, c’était un véritable feu d’artifice produit par les balles traçantes. Quand les Allemands sont partis, ils ont dynamité le sous-sol mais la partie superstructure n’a pas bougé », témoigne Bernard Daviau dans « Mûrs-Erigné au temps de l’Occupation ».
75 ans après la Libération, l’ancienne banque a donc été rasée mais le coffre-fort, ancien bunker nazi, existe toujours. « Oui, les vestiges sont restés tels quels, commente Damien Coiffard, maire de Mûrs-Erigné. C’était trop compliqué à boucher. Nous allons en faire un parking. »
Alain Laplace, adjoint au maire en charge de l’urbanisme, confirme. « La dalle, qui existait déjà sous la banque, est réapparue, dit-il. Il n’était pas possible de conserver l’ancien bâtiment de la banque car il n’était pas aux normes. La dalle va revenir dans le domaine public et nous allons en faire un espace public au centre de ce lotissement. »
Sous le parking, le bunker nazi reste présent. A-t-il dévoilé encore ses secrets ? « Tout le monde peut fantasmer mais il n’y a plus d’or du tout, assure Alain Laplace. L’endroit est sous les eaux et sombre. »
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Du haut de ses 88 printemps, Jean-Marie Pirault, l’enfant du pays devenu vigneron, lui non plus n’a rien oublié …
M. Jean Marie Pirault – Source Ouest France 2 octobre 2017
" Les Allemands étaient installés pas loin de chez mes parents, au château de la Dubinière où logeaient les officiers, et dans les casernements. "
L’ancien château de la Dubinière, son parc, les logements du béguinage Saint Vincent
De ses souvenirs d’écolier surgissent des images précises de cette propriété de 2,5 ha accolée à la rue Saint-Vincent.
À la fin de 1942, le site est devenu l’un des principaux quartiers généraux de la Kriegsmarine (marine de guerre allemande) pour l’Ouest du Reich.
« Quand il y avait une alerte, on les voyait de chez nous grimper vite fait en haut du bâtiment principal pour tenter de canarder les avions alliés avec leur DCA. »
Un blockhaus pour une banque
Le lieu abritait 75 soldats, officiers et « souris grises » (auxiliaires féminines de l’armée allemande). Dénommé la « banque », il avait déjà une histoire. Française, celle-là.
« Dès 1938, sentant le danger, le Crédit industriel et commercial (CIC), dont le siège est à Paris, décide de se replier en province, raconte Jean Brodeur, spécialiste de la période. En plus du bâtiment, il choisit de construire ici un immense blockhaus sous-terrain pour stocker ses titres de banque et le fond en or.»
Des installations modernes
« Après l’invasion de la zone sud, le CIC évacue les lieux, poursuit le chercheur. Les hommes du coin sont réquisitionnés pour inventorier les documents et charger les camions. » À la place de l’administration s’installe tout un complexe, allemand cette fois.
Fuyant Lorient et les attaques aériennes des Alliés, le commandement entend ici poursuivre sa mission : gérer à distance les navires de surface sillonnant les mers.
« Ils ont profité des installations en place, modernes pour l’époque. La liaison avec Paris et le haut commandement était primordiale. Le grand amiral Dönitz serait d’ailleurs venu là en 1944. »
Face à l’arrivée des Américains, l’ordre de Berlin est donné d’évacuer le 9août. La population doit suivre. Le blockhaus de la banque est incendié.
Jean-Marie Pirault et sa famille trouvent, eux, refuge à Faye-d’Anjou, laissant 200 lapins angoras dans les clapiers. « Les Allemands les ont chassés ! »
Lorsque les habitants regagnent leurs fermes, les mines et autres pièges sont légion. Les pilleurs sont aussi passés par là. « Nous, on a retrouvé du sang sur les draps. Sans doute un soldat allemand qui avait été blessé. »
Et bien, en voilà une histoire !!